La transformation de l’image
MONTRÉAL | JUIN 2018
Prenez une photographie nocturne. Apportez-y une touche numérique puis ajoutez un peu de peinture en aérosol. N’oubliez pas la dose de talents. Vous obtiendrez peut-être une création « photo-graphique ». Le hic, c’est que seul Pascal Normand en connaît réellement le secret.
Après des études en production télévisuelle à la fin des années 1990, Pascal Normand s’installe à Montréal, ville dont il tombe littéralement sous le charme. Il chemine dans le milieu du cinéma et réalise quelques courts métrages. Par plaisir, pendant près d’une décennie, il effectue de la photographie nocturne. « Je le faisais pour le sentiment de liberté. Pour se promener la nuit et tenter le dévoilement de la basse lumière qui provient du côté des ombres, en longue exposition », raconte-t-il. Sans ambition précise quant à cette pratique, il explore le monde urbain et découvre l’abondance de matières que lui offre sa cité bien-aimée.
L’art, au mépris du préjugé
À cette époque, il utilise la pellicule photographique, qu’il numérise par la suite. « J’avais déjà l’intention de recourir à Photoshop. Dans le milieu du cinéma et de la télévision, c’est tout à fait convenu qu’une image doit être transformée, par le montage et éventuellement par l’étalonnage », explique-t-il. Il ajoute qu’il y a quinze ans, la retouche était mal vue et donc moins courante qu’aujourd’hui dans la photographie artistique. Or, pour lui, les corrections apportées participent au plaisir du créateur. Il décide de poursuivre dans cette voie et fait fi des préjugés.
Ce n’est qu’en 2010, alors qu’il conçoit des affiches de petits formats, qu’il délaisse tranquillement le cinéma afin de se vouer à temps plein aux arts visuels.
Urbain
La production de Pascal Normand se compose principalement de décors urbains et industriels. Selon lui, la richesse visuelle des vieux bâtiments en détérioration et leur histoire leur donnent une substance. « J’ai toujours souhaité sortir des sentiers battus. Mes sujets appartiennent à la mémoire collective. Certains constituent des icônes, des repères dans la ville. Je m’affaire donc à les présenter sous un angle particulier », dit-il.
L’approche unique de Pascal Normand lui a d’ailleurs valu, au fil des ans, plus d’une douzaine de prix, bourses et mentions, obtenus un peu partout au Canada. Quoi de mieux pour sceller sa crédibilité? « Mais ce qui me rend le plus fier dans ce métier, ce sont des œuvres elles-mêmes. Lorsque quelqu’un fait l’acquisition de l’une d’entre elles et l’accroche à son mur, c’est pour longtemps », pense-t-il. Il souligne qu’il ne va pas de même pour le cinéma, par exemple, qui se consomme en l’espace d’une heure ou deux.
À la rencontre des gens
Malgré une production imposante, Pascal Normand ne sort son appareil que quatre ou cinq fois par année. « Je reste en observation constante, à la recherche de sujets potentiels. Ce repérage a lieu de jour, puisque la nuit, on peut être ébloui par les éclairages et on perd ainsi beaucoup de détails. » Le processus numérique et la matérialisation des œuvres suivront, jusqu’à ce qu’il y appose la peinture, conférant des textures réelles à ses photographies.
L’artiste s’occupe lui-même de la mise en marché de ses créations. Il s’agit pour lui d’un besoin; sa fibre entrepreneuriale le lui exige. Infolettres, expositions, symposiums, médias sociaux, stratégies de visibilité et site Web lui demandent beaucoup de temps. Enfin, il soutient que son travail ressemble à celui d’un politicien : il faut serrer des mains, aller à la rencontre des gens et posséder une base de fidèles solide.
Pour découvrir les œuvres signées Pascal Normand, on peut visiter le pascalnormand.com. On y retrouve une galerie virtuelle, de même que l’horaire des événements à venir.