Plusieurs pratiques, un seul monde

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Photo : Martin Savoie
13 décembre 2017

Plusieurs pratiques, un seul monde

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Photo : Martin Savoie
13 décembre 2017

ANDRÉE-ANNE LABERGE

Plusieurs pratiques, un seul monde

Rédaction : A. A. Fréchette
Photo : Martin Savoie
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VICTORIAVILLE | MAI 2014

La zone de confort constitue ce lieu convoité duquel on veut souvent s’extraire, sitôt qu’on l’a atteint. Andrée-Anne Laberge n’est pas du genre à se tenir là, immobile, et creuse toujours et encore les mille et une possibilités que lui offre son médium. Cette fois, l’encaustique l’a conduite vers la sculpture.

Le parcours d’Andrée-Anne Laberge est jalonné de mutations artistiques. Pour elle, tout commence dès l’enfance. Le foyer au sein duquel elle grandit est tout indiqué pour stimuler son intérêt pour les arts. Sa mère donne des cours de poterie et s’assied souvent avec ses trois enfants en leur fournissant du papier, des crayons et tout ce dont ils ont besoin pour s’exprimer.

À la petite école, les talents de dessinatrice d’Andrée-Anne sont remarqués, et elle en retire une très grande fierté. « Dans les livres, les illustrations me fascinaient et je tentais de comprendre comment y arriver », se rappelle-t-elle. Elle dessine durant ses cours pour concentrer son attention et gardera cette habitude jusqu’à l’université.

Elle accueille ses premières commandes à l’adolescence et découvre que ses habiletés pourraient l’amener beaucoup plus loin qu’elle ne se l’imaginait jusque-là. Elle se dirige donc vers les arts au Cégep de Sainte-Foy, où elle peaufine ses techniques en sculpture et en peinture. Le portrait et le corps humain l’intéressent. « C’est à cette époque que j’ai produit le plus de sculptures. Je sentais que ça venait me chercher différemment que le 2D », de dire l’artiste.

Suivant les conseils de son professeur de sculpture, elle opte pour l’Université Concordia. Toutefois, comme pour nombre d’étudiants, les affinités entre elle et la personne responsable du cours convoité ne sont pas au rendez-vous. « J’ai senti une incompatibilité dans la manière de percevoir les arts, explique Andrée-Anne. Je comprenais que je ne pourrais pas explorer ce qui m’intéressait. » Ne se laissant pas abattre, elle décide de miser sur ses autres forces.

Encaustique

Laberge est aujourd’hui reconnue pour son travail à l’encaustique, une technique de peinture où les pigments sont délayés dans de la cire fondue. Le médium doit donc être appliqué à chaud sur le canevas.

La rencontre avec cette technique ne survient qu’en dernière année de baccalauréat. « J’étais beaucoup dans le dessin, jusqu’à ce que je m’inscrive à un cours sur les techniques anciennes. » De tous les savoir-faire présentés, c’est l’encaustique qui la charme. Le hic : un spécialiste lui enseigne sa fabrication, mais rien en ce qui concerne son application. « Mais moi, j’adore les défis. Le fait que ma professeure, une artiste peintre reconnue, soit impressionnée par cette matière m’a donné le goût de la travailler. Dès la première fois, j’ai aimé ça et j’ai immédiatement compris l’aspect de la transparence, qui permet de faire des flous. »

L’encaustique est entrée dans sa vie. « J’avais l’impression de tout contrôler avec le dessin, mais je voulais quitter cet état. Je souhaitais retrouver une certaine liberté. Avec l’encaustique, je ne maîtrisais pas tout de la matière. Elle est chaude, alors quand tu l’appliques, ça bouge, ça réagit et ce n’est pas aussi précis qu’un trait de crayon. L’encaustique permet la magie et des effets surprenants », note-t-elle.

Dix ans plus tard, elle contrôle de plus en plus la mise sur toile de cette mixture, mais il y a toujours une part de sa réaction sur laquelle elle ne peut rien, sauf l’envisager.

Anciennes amours

Même si, pendant plusieurs années, Andrée-Anne se concentre sur ses toiles, elle n’oublie pas la sculpture. Tandis qu’elle crée, il arrive parfois, en fabriquant des couleurs, que la cire devienne saturée de pigments. Elle ne peut donc plus l’utiliser pour faire les couleurs désirées. « Je ne la jetais pas, car je me disais que je l’utiliserais dans des sculptures, un jour. » Elle accumule donc la cire usagée, sans trop savoir comment elle s’y prendra. Il en va de même des papiers ayant servi à essuyer son fer, ainsi que du coton fromage servant à filtrer ses mélanges, qu’elle souhaite réutiliser éventuellement.

Puis une série de petits bustes ont vu le jour tout récemment, issus de la réutilisation de tous ces matériaux et de différentes techniques, dont le façonnage, le modelage et la taille. Il s’agit d’un retour aux sources, réalisé en harmonie avec ses préoccupations écologiques.

Indissociables

Pour revenir à ses tableaux, Andrée-Anne constate y appliquer de plus en plus d’encaustique. « Ça se rapproche de la sculpture, car on y retrouve des bosses, des cratères. Je veux modeler le tableau. En fait, mon monde se transforme », constate-t-elle.

C’est que les deux disciplines auxquelles elle se consacre produisent, sous ses mains, des pièces d’une même famille. Le médium les lie, tout comme l’intention de l’artiste. « C’est beaucoup dans l’émotion qu’on peut faire le lien. Mes paysages demeurent des environnements romantiques. Je pense qu’ils appellent à une certaine émotion, qui se retrouve aussi dans mes bustes. » Les têtes deviennent, selon elle, des témoins des paysages qu’elle imagine. Le lien se veut sensible.

Pour l’instant, elle ne sait trop où cette nouvelle avenue la conduira. En restera-t-elle à des représentations humaines? Les sculptures se matérialiseront-elles dans de plus grands formats? Une chose demeure certaine, cette pratique est bien présente dans sa démarche.

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