Liberté numérique
SAINT-LOUIS-DE-BLANDFORD | AVRIL 2016
Depuis l’avènement des arts numériques et leur métissage avec les arts visuels, on se demande parfois, devant certaines œuvres, quelles manipulations ont été nécessaires à leur création. Une part de cette fascination curieuse nous a menés vers Linda Vachon.
Le talent de la créatrice installée à Saint-Louis-de-Blandford fut un secret bien gardé pendant fort longtemps. Mais puisque le Web abolit les frontières, sa production ne représente maintenant plus un mystère, ici comme un peu partout sur la planète.
L’art a toujours fait partie de sa vie, nous dit Linda Vachon. La seule chose qui a changé avec le temps : sa façon de s’y consacrer. D’abord graphiste durant quelques années, elle abandonne ce domaine qu’elle juge trop contraignant sous divers aspects. Confection de bijoux et peinture sur soie constituent d’autres avenues créatives qu’elle explore sur le marché du travail. Pourtant, rien ne la satisfait; elle se résout donc à se contenter d’un emploi dans un commerce de détail. Mais arrive le jour où se consacrer pleinement à la création personnelle devient une nécessité.
Êtres numériques
« Mon médium, c’est l’ordinateur, commence-t-elle. On note deux aspects principaux dans mon travail. D’abord, il y a le dessin. Je n’utilise pas de tablette graphique; j’y vais directement avec la souris, car je ne veux pas de traits réguliers. C’est de là que naissent mes personnages. Il y a également, dans mes œuvres, une part poétique très importante qui se transpose notamment dans les paysages. »
Difficile d’expliquer une entreprise qui exige des interventions aussi multiples que variées. Parfois, le dessin peut être exécuté à la main avant d’être numérisé et réutilisé en partie dans plusieurs pièces. Mais, plus couramment, tout ce que Linda Vachon crée est numérique.
Influencée, entre autres, par l’illustrateur Lino, elle admet que ses personnages peuvent s’avérer effrayants. « Mais il y a tellement de liberté sur le plan esthétique », plaide-t-elle. Liberté ou plutôt libération, puisque Linda Vachon perçoit des bribes autobiographiques dans chacun de ses protagonistes. « Beaucoup d’artistes ferment la porte à cette partie du monde intérieur qui peut être dérangeante. Moi, ça me fait du bien d’y aller. Quand je regarde le travail accompli, je découvre ce que j’avais à exprimer », confie-t-elle.
Apport du texte
Linda Vachon a effectivement quelque chose à dire. Si elle brasse les pixels pour faire image, elle n’hésite pas à recourir aux mots pour aller encore plus loin. Là encore, une logique binaire s’est installée. « Il y a du texte, mais les mêmes messages reviennent : “Écoute-moi” et “Comprends ce que tu veux”. » Ces résurgences se veulent parfois presque pathétiques, d’autres fois apathiques. En outre, les mots ramènent l’observateur à une part de lui-même; le désir d’être écouté étant, par exemple, inné chez l’être humain, mais se développant de façon particulière chez chacun.
Œuvre matérielle
Une fois le travail numérique imprimé sur du papier photographique, l’artiste procède à un marouflage sur panneau de bois. Par différents procédés (collage, grattage, limage), elle s’assure de laisser une empreinte bien réelle sur l’œuvre.
Ses images, que l’on peut découvrir sur sa page Facebook Linda Vachon/tête de caboche, se retrouvent également sur Etsy sous forme d’estampes numériques ou d’accessoires. Ainsi, des amateurs d’art établis un peu partout sur la planète se sont déjà portés acquéreurs d’une de ses œuvres ou d’un objet qui en arbore une reproduction. « J’aime les galeries, mais ça ne rejoint pas tout le monde. Et si j’ai un coup de cœur, je ne peux pas nécessairement me l’offrir. Je veux que mes œuvres soient accessibles et que les gens puissent les ramener chez eux », soutient-elle. À cela, elle ajoute que le fait de se départir rapidement de certaines pièces lui permet d’en produire de nouvelles.
Bien entendu, Linda Vachon compte exposer de plus en plus le fruit de son labeur dans des lieux de diffusion conventionnels. Déjà, elle confirme qu’elle sera à la Galerie des Nanas à Danville, du 4 août au 4 septembre 2016.