La scène pour médium
VICTORIAVILLE | AOÛT 2014
Pour être comédien et vivre à Victoriaville, il faut posséder toutes les aptitudes qui font de soi le professionnel de la situation. Pierre Luc Houde a su prouver qu’accumuler les talents constitue une bonne façon de se rendre indispensable à la vitalité culturelle de sa région.
À peine arrivé pour l’entrevue, Pierre Luc me raconte avoir déjà rédigé un texte pour les Tigres de Victoriaville, destiné à être présenté au Panthéon de la performance. « J’avais écrit un slam super punché et ça avait été très inattendu. Les gens sont toujours surpris de triper autant pendant un discours ou un laïus », commence-t-il.
Arts de la scène
En l’écoutant, je réalise que je n’ai pas affaire à un simple comédien de série pour enfants. Quand je lui en parle, il me relate que, adolescent, il s’intéressait aussi à la musique. « Je jouais du saxophone, de la batterie, de la guitare et de la basse. Présentement, je joue aussi du piano. Quand je compose un texte à une voix, c’est la culture du drum qui embarque. C’est ce qui soutient le rythme de mon écriture. »
Je lui demande de me parler des origines de sa passion pour le jeu et pour l’écriture. « Très jeune, je me souviens que ma mère, me présentant à une de ses amies, a dit : “Lui, c’est mon petit dernier, le clown de la famille”. J’ai l’impression qu’à ce moment, elle m’a jeté un sort. » Il s’intéresse ensuite à l’humour, au jeu et à tout ce qui se passe sur une scène. « J’ai aussi fait de la danse et de l’impro, au Tandem. Je profitais de toutes les occasions de faire du théâtre. »
Aussi metteur en scène pour plusieurs artistes de la région, il admet que ses formations en danse, en théâtre et en musique lui ont permis de passer facilement de la scène aux coulisses. « Mais quand vient le temps de choisir des couleurs, des costumes, des maquillages, là, je me tourne vers d’autres personnes. Rien que pour m’habiller le matin, je laisse ça à ma blonde », lâche-t-il en riant. En fait, il constate que tout ce qui ne bouge pas et n’émet aucun son l’intéresse un peu moins.
Victoriaville
Mais pourquoi celui qu’on a vu dans des téléséries telles que Virginie, Ramdam, Une grenade avec ça?, Emma et, encore aujourd’hui, Les Argonautes, en est-il venu à désirer vivre à Victoriaville à tout prix? « Tout sauf Montréal, dit-il. Je faisais mon jogging dans le parc La Fontaine, après que ma blonde ait effectué un test de grossesse positif; même si j’étais dans le parc, je trouvais que ça puait le gaz. Je ne voulais pas élever mes enfants là. Non pas que je trouve ça ridicule de le faire, mais moi, j’ai grandi en région, et c’est ce que je voulais pour eux. Ma mère habite ici et les parents de ma blonde aussi. Quand tu élèves des enfants, tu as besoin des grands-parents. C’est bien pratique » note-t-il, espiègle. Il ajoute que la présence du Parminou a également pesé dans la balance.
À Montréal, Pierre Luc pouvait se permettre de se consacrer exclusivement à son métier de comédien. En revenant ici, il a dû faire une croix sur certaines pratiques qui y sont liées, comme le doublage, et mettre la pédale douce sur les auditions. « Il a fallu que je développe mes talents connexes pour vivre de mon art. C’est à ce moment que j’ai commencé à faire de la mise en scène au Parminou.»
Parmi les artistes d’ici avec qui il a travaillé, notons le groupe Audionaute, la chanteuse lyrique Julie Breton et le duo de magiciens Mia et Matéo. Or, ses propres capacités l’amènent à être sollicité pour l’écriture et la présentation de numéros créés sur mesure pour des entreprises, des fondations et des événements. D’ailleurs, il a toujours de nouveaux projets.
Poésie pour les entreprises
« Je commence à peine ce projet, alors j’hésitais à en parler. Je compose de la poésie corporative. Le but : écrire pour une compagnie un poème qui traite de ce qu’il y a de plus beau chez elle. Je désire en faire des œuvres picturales, c’est-à-dire coucher mon texte sur un objet (une vitre, du bois, du béton ou même une peinture) et trouver l’artiste dont le style correspond à l’identité de l’entreprise. »
Son souhait est de rendre l’art disponible, au-delà de ses manifestations habituelles. « Je veux donner la chance aux travailleurs de lire le poème une fois, de le relire quatre ans plus tard, de rester en contact avec et qu’il leur propose une vision poétique du métier qu’ils exercent. » Après avoir conçu nombre de numéros pour des événements organisés par des entreprises, il sait l’importance du sentiment d’appartenance et, surtout, la grande valeur de tous les métiers.
Télé-Québec
Très actif ici, Pierre Luc n’a pas tout à fait coupé les ponts avec la métropole. Préférant de loin les rôles où la créativité est sollicitée à l’extrême, il admet être bien servi avec son personnage de Xodias dans Les Argonautes, l’émission jeunesse la plus écoutée au Québec comme à la chaîne Télé-Québec, tous groupes d’âge confondus. Il se trouve d’ailleurs en tournage ces temps-ci, et ce, jusqu’en février 2015. Il adore ce personnage auquel il a attribué à la fois la philosophie des rastaman et des yogis. Le comédien a dû mener une importante recherche pour lui composer une personnalité originale et attachante. « Il ne ressemble à aucun autre personnage extraterrestre et j’en suis très fier. »
L’entrevue tire à sa fin, et il me semble que nous n’avons pu qu’aborder en surface le travail de l’artiste. Pierre Luc m’explique que pour lui, tout est lié à une seule motivation : celle de faire du bien et de participer à l’avancement de la société. À l’instar du Parminou, qui propose du théâtre populaire engagé, Pierre Luc aime intervenir directement auprès des gens. Les projets qui lui sont confiés par des organismes liés à la santé et au milieu communautaire lui donnent l’occasion d’aider les gens et de constater les impacts directs de sa création. Parler de sujets importants et mettre de côté l’aspect superficiel, voilà ce qui lui tient à cœur, peu importe la discipline empruntée.