La beauté pour guérir l’humanité
TROIS-RIVIÈRES | JUILLET 2018
Certaines expériences sont vouées à nous marquer à jamais. Certaines chansons qui nous rappelleront de chauds étés. Certaines odeurs, saisies plusieurs années après votre déménagement de la maison familiale vous ramèneront à votre tendre enfance. Ou encore, après avoir lu un roman ou vu une toile, vous serez bouleversé. Sans réellement comprendre pourquoi, mais assez pour qu’un changement à l’intérieur de votre être, de votre âme, s’effectue. C’est ce type d’art qu’Isabelle Clermont crée.
Elle crée une expérience. Une expérience qu’elle veut marquante. Elle souhaite qu’à la sortie de son installation, cette dernière ait laissé une trace sur son visiteur. Une trace aussi intense et viscérale que l’œuvre en soi. Les œuvres de l’artiste sont enveloppantes et immersives. Que ce soit par le lieu dans lequel elles sont installées ou par la conception sonore qui résonne, ici et là, lors de votre présence en ce lieu. De ces lieux se dégage une forte spiritualité qui amène le visiteur à se reconnecter avec son for intérieur. C’est l’ancestral dans une disposition actuelle. Le spectateur évolue durant l’exposition et tous ses sens sont mis à profit. Une stimulation complète pour laquelle ce dernier doit aussi fournir un effort, car bien qu’il soit spectateur, il est en premier lieu au centre de l’œuvre. En fait, il passe au travers de divers tableaux.
Effectivement, Isabelle Clermont mentionne que le relationnel se retrouve au centre de chacune de ses œuvres. Que ce soit la relation entre l’œuvre et le spectateur ou encore les relations qui se créent dans le processus de recherche préinstallation. Il faut dire que pour une grande installation, comprenant des œuvres sur plusieurs plateformes différentes, cela peut prendre jusqu’à deux ans afin de franchir le fil d’arrivée. Dans la traversée des harmonies, la créatrice a rencontré plusieurs femmes, de saison en saison, afin d’enregistrer leurs voix. Ces voix qui révèlent sans filtre un sentiment, une réaction. Rien n’est laissé pour compte et pas seulement pour l’aspect sonore. Ses femmes l’ont inspirée et la relation forgée avec elles a servi de moteur créatif pour l’artiste interdisciplinaire.
C’est deux années durant qu’Isabelle Clermont montera, pièce par pièce, son grand projet. Le point de départ : le lieu de l’installation. Elle explique que lors du premier opus de la traversée des harmonies/la sacrée, elle s’est sentie très inspirée par l’architecture de la chapelle. Elle a passé plusieurs heures couchée au centre de la pièce, ressentant profondément l’esprit de l’espace; se laissant habiter par celui-ci. Puis, elle passe à la création sonore. L’artiste a toujours été connectée à sa fibre musicale, commençant les leçons de piano à l’âge de 4 ans. Finalement, elle part à la découverte des objets, surtout du recyclé ou trouvé en forêt, qui feront partie du paysage de l’expérience. Elle aime le naturel. Le « brut ».
L’artiste a mentionné qu’elle ressentait le besoin de créer avec plusieurs médiums puisqu’il lui serait impossible de créer la complexité de ses visions à l’aide d’un seul de ceux-ci. Elle ne se met aucune limite. Aucune étiquette. Elle agit comme créatrice et sculptrice de l’espace; c’est l’un des nombreux beaux côtés de l’art actuel. Plus besoin de limiter son inspiration créatrice. Elle peut la laisser libre de déambuler et de lui amener le nécessaire pour faire du beau et du bon, pour l’âme et l’esprit. Elle présentera bientôt La traversée des Harmonies opus no.2/La déménagée. Cette œuvre éphémère d’une journée prendra place dans un camion de déménagement, au moins d’août, lors des événements de la Biennale nationale de sculpture contemporaine.
Isabelle Clermont c’est un amalgame, elle aussi. Une chercheuse. Une athlète. Une musicienne. Une dessinatrice. Une metteure en scène. Une récipiendaire de bourses telles que le CALQ, les Grands Prix Culturels, les prix Arts Excellence, ainsi que le CRSH et le FQRSC.
Mais c’est surtout une tisserande au service du beau.
Je la cite : « La beauté pour guérir l’humanité ».